RADIO

 

LES CARACTÉRISTIQUES GÉNÉRALES

La radio est un fabuleux média de masse. Elle est d’une puissance colossale. Elle rejoint un grand nombre de personnes et chacune d’elles éprouve le sentiment d’être en lien direct et unique avec la voix de la radio. C’est un rapport intime et chaleureux qui s’établit entre la radio et son auditoire. De plus, la radio est accessible absolument partout. Pas une seule petite parcelle de territoire, ni la plus petite surface d’un océan qui ne reçoive un signal électromagnétique émis par une radio quelque part. Ce peut être sur la bande AM, FM ou sur ondes courtes. La Terre est tout entière reliée par la radio.

La radio est également un média simple. De partout dans le monde, sans préavis, instantanément, sans autre outil qu’un téléphone, quelqu’un peut entrer en ondes et diffuser immédiatement sur l’ensemble d’un réseau. Les téléphones cellulaires et satellitaires permettent même aujourd’hui ce contact direct dans des zones complètement coupées du monde, qu’elles soient au fin fond d’un désert ou dans des zones sinistrées. Cette propriété fait de la radio le média numéro 1 des situations de crise.

La radio ne coûte pas très cher. Si on la compare à la télévision, notamment, on constate que, une fois assumés les frais d’installation, les dépenses principales sont constituées des salaires du personnel. Voilà un avantage formidable pour les pays en développement. C’est vrai aussi dans le réseau des radios communautaires des pays développés qui font régulièrement la preuve qu’on peut jouer un rôle social très actif, rayonner dans sa communauté et susciter la participation citoyenne sans investissements colossaux.

La radio ne coûte pas cher non plus à ses auditeurs. Le développement de la miniaturisation, par exemple, la fabrication de baladeurs, également, ont fait faire un boom énorme à la radio. Elle est disponible à tous. Facilement. Équitablement.

La radio est également un merveilleux mode de communication. Grâce à elle, on peut s’adresser à la fois à l’intelligence et à la sensibilité des auditeurs. Comme la presse écrite, elle permet un contenu complexe et comme la télévision, elle autorise un contenu émotif. Elle n’a pas le côté parfois rebutant de la presse écrite ni le côté sensationnel de la télévision. Elle dispose du meilleur des deux. Bien que fréquemment menacée de disparaître, elle revient toujours en force et continue de s’imposer malgré le développement de nouvelles techniques qui, loin de lui nuire, lui donnent au contraire aujourd’hui une nouvelle dimension.

L’arrivée du numérique, associé à la production et la diffusion des émissions de radio, a considérablement modifié le paysage de la radio traditionnelle. C’est vrai également d’Internet qui, entre autres choses, prolonge aujourd’hui la vie d’une production radio jusqu’ici condamnée à une existence très éphémère et permet en même temps une diffusion sans limites géographiques.

Contrairement à la communication interpersonnelle, le propre des médias de masse est de rejoindre le plus grand nombre de personnes en même temps et, comme les autres médias de masse, la radio se définit également par l’absence de rétroaction.

Cela est vrai même si le développement d’Internet permet aujourd’hui aux auditeurs de commenter fort rapidement – et parfois sans beaucoup de distance ni de précautions – les contenus entendus. Les tribunes téléphoniques représentent aussi une forme de rétroaction, un peu comme le courrier des lecteurs d’un quotidien.

On dit que c’est une séquence communicationnelle unidirectionnelle, contrairement à un échange entre deux personnes qui, lui, constitue une séquence bidirectionnelle au cours de laquelle il est toujours possible de vérifier si le sens du propos est bien compris. La compréhension est parfois implicite, parce que les antécédents de chacun permettent de la tenir pour acquise, elle est parfois explicite à travers des expressions comme : « Comprends-tu ? », ou d’autres conventions de langage, ou encore des expressions non verbales comme le hochement de tête qui vient ponctuer la compréhension.

En radio, il faut se passer de tels procédés et s’assurer le plus possible d’être compris instantanément, à la première écoute et pour le mieux. C’est une caractéristique dont il est important de tenir compte pour développer des techniques efficaces de communication radiophonique.

La radio peut sembler désavantagée par rapport aux autres médias de masse comme la presse écrite ou la télévision. La presse écrite est très impersonnelle par rapport aux médias électroniques, mais elle permet à ses lecteurs de revenir sur un article autant de fois qu’ils le souhaitent pour s’assurer de la bonne interprétation du texte. Les lecteurs peuvent mettre le journal de côté pendant un certain temps et le relire quand ils le souhaitent. Le texte s’inscrit dans l’espace. La radio, dans le temps.

La télévision est aussi un média inscrit dans le « temps », mais elle dispose du support de l’image pour renforcer le propos. D’ailleurs, dans le journalisme télévisuel qui se développe depuis l’arrivée des chaînes d’information continue, le journaliste de télévision devient un simple témoin de l’événement qu’il se contente de décrire sans l’analyser et chercher à le comprendre. L’idée mérite nuances et explications, mais il est clair que l’image prend aujourd’hui la part la plus importante du contenu télévisé.

Sans image et sans espace, la radio peut sembler le parent pauvre des médias de masse, mais c’est oublier sa caractéristique fondamentale : la radio est un formidable outil d’imagination et cette fonction n’a pas de limites. Les sons de la radio, les voix, les visages qu’on imagine, les silences qu’on interprète, la musique qui vient ouvrir et fermer des émissions comme les chapitres d’un livre… Autant de suggestions à imaginer. Si elle sait bien faire entendre, la radio donne à voir.

Ces propriétés peuvent aussi servir à des fins de manipulation. Des exemples démontrent qu’on peut déplacer des foules par la seule puissance de la radio et pousser des populations entières à commettre des actes insensés.

L’AUDITOIRE

L’auditoire de la radio est libre. Libre de rester à l’écoute, de cesser d’écouter, de syntoniser une autre chaîne… Libre aussi de passer l’aspirateur, de discuter dans la voiture pendant la diffusion de votre émission ou de votre fabuleux reportage, ou de faire la vaisselle en famille. L’essentiel de la démarche de production radiophonique est de conquérir cet auditoire. Il faut aller le chercher, le convaincre de rester et s’assurer d’un minimum de rétention de contenu de sa part. Pour obtenir cette rétention du contenu, il est important de toujours se souvenir que l’on n’a qu’une seule chance d’être entendu et compris. Le propos doit être dit pour être compris à la première écoute. Du premier coup. Sans appel. Cette caractéristique fondamentale de l’auditoire de la radio aura de nombreuses conséquences sur l’écriture dans ce média, sur la façon de l’aborder, de raconter les histoires et d’utiliser les sons pour en faciliter la compréhension.

L’auditoire de la radio fluctue beaucoup au cours d’une journée, mais on peut dégager des constantes dans les sondages qui visent à mesurer ce taux d’écoute qu’on nomme la cote. BBM est le principal organisme de mesure du volume d’écoute de la radio au Canada.

C’est le matin, dès le point du jour, que les auditeurs sont les plus nombreux à écouter la radio. La radio accompagne bien le début de journée. Les émissions dites de services remportent la palme. On a besoin de savoir de quoi la journée sera faite. Que prévoit la météo ? Que dois-je savoir du monde qui m’entoure pour sentir que j’en fais partie ? Quel est le résultat du match d’hier dont je n’ai pas vu la fin ? En combien de temps me rendrai-je au travail ?

L’auditoire se maintient pendant quelques heures entre le jogging, la cuisine, la voiture – jusqu’à l’arrivée au travail – pour diminuer ensuite sensiblement pendant la journée avec néanmoins une pointe à l’heure du repas du midi, surtout dans les petites villes où les gens retournent manger à la maison. Les cotes baissent de nouveau au cours de l’après-midi, mais connaissent une autre pointe lors du retour à la maison en fin d’après-midi, avant de diminuer ensuite systématiquement jusqu’au lendemain matin.

Qui écoute la radio ? Tout le monde, peut-on répondre, à peu près sans exception. Que ce soit d’une oreille attentive ou distraite, pour une musique de fond ou un intérêt soutenu, tout le monde écoute la radio à un moment ou à un autre de la journée, quand ce ne serait que dans l’ascenseur ou chez le dentiste.

Évidemment, tout le monde n’écoute pas la même chose et parce que la radio est d’abord une industrie, chaque station de radio vise une clientèle particulière. Les stations privées doivent donc définir une couleur musicale, un type d’émissions, des sujets d’intérêt divers tels les sports ou la santé, et cibler un auditoire particulier. L’auditeur type doit se reconnaître dans sa station de radio. Il faut notamment que le choix musical corresponde à ses goûts et ne s’en éloigne pas trop. La radio privée à vocation strictement commerciale cherchera à fidéliser cet auditoire principalement par sa programmation musicale. Mais la radio est beaucoup plus qu’un juke-box.

La radio privée est orientée vers les profits. Plus encore, selon toute apparence, depuis la réduction du nombre de propriétaires et la création de grands consortiums. Ce sont des empires financiers qui contrôlent aujourd’hui au Québec et au Canada toute l’industrie de la radio. Comment croire que ces stations étaient, il n’y a pas si longtemps, entre les mains de propriétaires indépendants ? En 1970, près de 50 % des stations de radio appartenaient à un propriétaire unique. En 2000, leur nombre est tombé à environ 5 %.

Plusieurs stations de radio ont aussi changé de propriétaire ces dernières années à la suite de l’entrée en vigueur en janvier 1999 des nouvelles règles du CRTC en matière de propriété. Le paysage radiophonique est transformé.

Des journalistes et des groupes sociaux se sont opposés à ce virage dans l’industrie de la radio privée dont l’information locale est la première victime. Les salles de nouvelles ont en effet souvent disparu ou se sont concentrées dans une seule localité d’où elles desservent un grand territoire. Les stations font de plus en plus appel aux agences d’information électronique, reproduisent ainsi les mêmes nouvelles partout et réduisent le nombre de sources d’information. Ces changements ne sont pas sans conséquences sociales. Il est amplement démontré que l’information locale et régionale contribue au premier engagement politique démocratique des citoyens d’une communauté. La radio, dont l’objectif sera clairement et uniquement de faire des profits, ne jouera plus ce rôle auprès de ses auditeurs.

L’ÉVOLUTION : INTERNET ET LA RADIO, L’AVENIR ?

Depuis ses débuts, la radio a été condamnée à mort un grand nombre de fois par tous les observateurs. Condamnée à une disparition imminente à l’arrivée de la télévision en particulier, certains diraient que, tel le phénix, la radio renaît toujours de ses cendres. En réalité, et plus simplement, la radio a toujours su intégrer les nouvelles technologies à son profit. Sa capacité de s’adresser à chacun, en toute intimité, en fait un média d’une très grande souplesse. Sa force d’adaptation, peut-être liée à sa simplicité, est immense. Toujours est-il que les techniques nouvelles semblent bien plus lui profiter que lui nuire. Ainsi, Internet, loin de nuire à la radio telle que nous la connaissons, lui offre un nouveau souffle. Il est même à parier que cette porte ouverte sur le monde entier donnera à la radio un pouvoir énorme pour atteindre d’un seul coup toute la planète. Les sites des stations de radio permettent désormais une diffusion sans limites géographiques. Jusqu’à tout récemment, un permis d’émettre à une fréquence donnée et avec une puissance déterminée fixait les frontières de l’écoute de la radio. Aujourd’hui, les émissions de Radio France International sont diffusées en direct sur Internet et les émissions de la Première Chaîne de Radio-Canada sont accessibles en même temps sur les cinq continents. L’époque du « a beau mentir qui vient de loin » sera peut-être bientôt révolue.

Par ailleurs, l’archivage des émissions prolonge considérablement leur durée de vie. Il faut parfois de nombreuses heures pour arriver à un résultat satisfaisant dans un reportage radio ou un documentaire audio qui sont l’objet d’un montage multipiste avec beaucoup d’éléments sonores. Le fait que les documents restent longtemps accessibles aux auditeurs intéressés – grâce à l’archivage électronique – donne aux journalistes radiophoniques le désir de se dépasser. Jusque-là, le caractère éphémère de la radio – la radio d’une seule diffusion – exigeait le même travail pour bien moins de satisfaction liée à la longévité.

Maintenant la radio est aussi parfois diffusée entièrement sur Internet. Les blogues commencent à se tailler dans certains cas une vraie place dans le monde de l’information. Leur mode d’écriture privilégié s’apparente beaucoup à celui des médias électroniques : on écrit pour être dit. De multiples façons, Internet est inscrit dans l’avenir de la radiodiffusion et fait taire les prophètes de malheur. La cause est entendue. La radio ne disparaîtra pas.

Source: https://books.openedition.org/pum/10140

Crédit photo : ONU


AIP


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